vendredi 8 février 2013

33. Les rires de la danseuse.

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Malgré le laps de temps écoulé, Bleue ne se remettait pas de sa surprise.
Ainsi donc, le fameux professeur des jumeaux, qui les avaient entrainés durant trois ans au fond de la forêt bordant Faier-Hayrdhann, n'était autre que le très fameux Villi Tylmaridior ?! Le Médecin Impérial ? Quelle surprenante découverte, pour elle.
Les jeunes gens s'étaient couchés depuis quelques minutes, ne trouvant pas d’autres solutions envisageables, mais régnait désormais dans la chambre un calme à peine troublé par la lente respiration des garçons endormis. Seule Bleue était encore éveillée, tourmentée par ses pensées et réflexions sur Villi Tylmaridior, et le lien qu’il ait pu avoir avec les jumeaux. Comment l’avaient-ils connu ? Comment Elyo et Willan avaient t'ils rencontrés cet homme si célèbre et si respecté?
Bleue reposa sa tête sur le matelas, prêtant attention aux bruits doux de la chambre. La respiration calme et fragile de Fline, et celle discrètes des jumeaux. Willan avait tourné sa tête vers le feu, faisant ainsi face à Bleue. Elle observait ses traits fins depuis quelques minutes, toujours perdue dans ses pensées. Elle voulait que Fline retrouve la voix. Peut-être Tylmaridior pourrait-il faire quelque chose pour eux. Elle ferma les yeux. ... Peut être Tylmaridior pourrait faire quelque chose…
Elle l'espérait, mais au fond d'elle même, une petite voix lui disait de renoncer.

(…)

Le matin vint, éclairé par un merveilleux soleil. Cela faisait déjà une semaine qu'ils étaient à Reiche Stadt, et aucune trace de Tylmaridior, en dépit de leurs recherches acharnées.
Elyo était en ce moment même dans le centre ville, seul.
Les autres étaient partis s'occuper de trouver à manger pour le midi, car l'aubergiste avait demandé à ce qu'ils quittent les lieux depuis qu'un mystérieux oiseau venait ici chaque soir pour s'amuser à effrayer les clients, et les soupçonnant d’être les responsables, les avaient espionnés. Et avait ainsi manqué de faire une crise cardiaque en voyant l’un des garçons se transformer en rapace. Fline avait beaucoup ri, et ne s'était calmé qu'un quart d'heure plus tard.

Les mains dans les poches, habillé d'une chemise blanche, d'un pantalon de cuir noir, et ses longs cheveux ébouriffés, nattés, sifflotant, Elyo avançait dans les rues, sans but particulier. Il déambulait tranquillement, non sans un certain entrain. Nonobstant, cela faisait plusieurs minutes qu’il remarquait que certaines filles le suivaient discrètement, comme des petits poissons friands. . Certaines l'interpellaient, et c'était avec amusement qu'il répondait par un salut courtois. Il s’amusait, découvrant avec une agréable surprise l’intérêt de crâner auprès des demoiselles. Cela lui donnait l’impression d’être bien différent du garçon craint et insulté de Faier-Hayrdhann.
Elyo vit soudain une jeune fille d'une quinzaine d'année, ses longs cheveux noirs volants autour d'elle, arriver près de lui en courant. Il se stoppa avec un sourire. Elle se figea, lorsque arrivée à sa hauteur, et bien que rougissante, le salua avec chaleur.
  • Bonjour monsieur. J’aimerais pouvoir aller me vanter auprès des autres de connaitre votre prénom, m’en feriez-vous l’honneur ?
Elyo étouffa un rire, franchement amusé.
  • Il est de convenance, ici, de dire « monsieur » à un garçon de quinze ans ?
  • C’est toujours plus poli pour accueillir un beau garçon !
  • Haha ! Moi c’est Elyo.
  • Ravie de vous rencontrer, alors, M. Elyo. Vous êtes étranger, n’est-ce pas ?
  • Je viens de loin, en effet, ricana Elyo en étudiant les mouvements de la jupe bariolée de la jeune fille.
Cette dernière se planta devant lui, un sourire simple étirant ses lèvres, dans une figure douce, et croisant ses mains derrière son dos, le dévisagea.
  • Moi, c’est Gwendydd.
  • Ravi de te rencontrer Gwendydd.
  • Vous accepteriez que je vous fasse visiter la ville ?
  • Oh ! Avec plaisir, s’exclama Elyo, en arborant un sourire angélique.

La compagnie de Gwendydd était agréable, très féminine. Différente de celle de Bleue en tout cas. Bleue avait une aura féroce, meurtrière. Elyo l'avait sentie. Mais Gwendydd était innocente, joyeuse. Ils traversèrent la ville, Gwendydd riant de tout, lui expliquant ce qu'il voulait savoir. Mais surtout, elle n'était pas bavarde comme une pie, contrairement a ce que pensais Elyo. Elle riait beaucoup, mais ne parlait que par intérêt. Quand il voulait une explication sur telle ou telle chose, elle se faisait un plaisir de lui raconter.
Elyo savourait cette journée, cette liberté de marcher dans une ville remplie et vivante, ou personne ne se stoppait dès qu'on l’apercevait, ou l'insultait, ou s'enfuyait. Gwendydd se stoppa soudain, et Elyo, qui flânait le nez en l'air, failli lui rentrer dedans. Il leva la tête, et comprit la soudaine paralysie de Gwendydd. Devant eux, des hommes habillés de noir les fixaient, plantés en plein milieu de la ruelle qu'ils traversaient. Elyo sentit son cœur se serrer dans un étau de fer impressionnant, croyant pendant une seconde reconnaître ces hommes. Ce n'étaient pas eux, mais le souvenir s'imposa dans son esprit avec la férocité d'un Kalionss.
Les hommes entraient dans la chambre, armés, et Karly s'avançait.
Gwendydd recula doucement. Les hommes se retournèrent, comme au ralenti. Elyo ne respirait plus. Une aura de meurtre les entourait, comme si la noirceur de leurs habits les en imprégnait. Un homme s'approcha d'un pas. Et il souleva sa capuche sombre dévoilant son visage.
  • Gwen … Je suis heureux de te revoir... très heureux...
Elyo ne bougeait plus. Gwendydd s'était mise à trembler.
L'homme approcha sa main de la jeune fille, un poignard installé entre ses longs doigts.
  • Dis-moi, tu te rappelle la promesse que tu m'as faite ? Tu sais, les deux milles hens, pour soigner je ne sais qui ? Tu te rappelle ? Oh, ne fais pas cette tête, je sais que tu ne les a pas... par contre, tu es venue, c'est heureux, tu pourras payer ta dette, comme ça.
Un homme se mit à rire.
  • Oui, je vais te garder un peu pour moi, tu mérite bien deux milles hens, non? Combien te vends ta chère maman ? Un peu moins que ça, non ? Pas grave, en tout cas, ce soir, je te réserve une nuit spéciale …
Gwendydd était tombé par terre, l'homme se rapprochait toujours plus d'elle. Le cerveau d'Elyo se remit à fonctionner. A toute vitesse. Il la contourna, se plaçant face à elle, le regard résolu.
  • C'est très simple. Le premier qui s'approche d'elle se reçoit mon poing dans la figure.
  • Non, vraiment ? Rit un homme en s'avançant, particulièrement grand.
Elyo posa sur lui un regard dénué de frayeur, frimant ouvertement en refusant de se laisser impressionner par la musculature évidente de son adversaire. Il serra les poings, se jurant de ne laisser aucun de ses hommes toucher Gwendydd. Il y avait eu trop peu d'occasions durant lesquelles il avait pu agir : et aujourd'hui, il refusait de s'enfuir. Mais si ça risquait de faire certainement très mal.
L'homme, sans attendre, lui balança un coup de poing. Un crochet droit qui atteint Elyo, le percutant violemment à la mâchoire. Explosant de rire, les autres hommes se mirent à rire, tandis que Gwendydd reculait, allant se placer près d'un mur. Elyo tituba, puis furibond, s'équilibra, pour courir droit sur son adversaire. Ce dernier, surpris par la violence d'un coup de pied qui lui explosa deux côtes, alla rouler dans la poussière, aux pieds de ses partenaires. Ces derniers posèrent sur Elyo un regard horrifié, cherchant alors à évaluer sa force. Elyo sourit.
« Facile de s'en prendre à des plus faibles que soi, hein ? »
Malgré son sourire, Elyo ne se ménageait pas. Son esprit, semblable à l'eau, était calme et lisse. Mais prêt à infiltrer chaque faille que présenteraient ses adversaires. Cette aptitude mentale, que son professeur, Villi Tylmaridior lui avait enseigné quelques années auparavant, se nommait Zanshin.
Il refusait d'avoir peur, il refusait de craindre le nombre de ses adversaires, il refusait de se prendre pour un héros. À ses yeux, ne comptait que la victoire. Voyant que les hommes en face de lui hésitaient, il fonça sur eux, en criant. Épouvantés, les hommes réagirent à la manière de passereaux effrayés. Certains de leur intimidation, ils s'étaient reposés sur l'avantage du chiffre. Mais maintenant que le plus fort d'entre eux était à terre, la peur s'était emparée de leur raisons. Deux d'entre eux sortirent leurs lames, cherchant à découper un membre du jeune métis, mais ce dernier, armé d'une volonté le rendant non maitrisable, s'occupa de les rendre K.O en deux coups de poings dévastateurs, massacrant leur sternum. Un homme l'attrapa par les épaules, pour l'immobiliser, et Elyo, à la manière des exercices imposés par Tylmaridior, dans lesquels il s'était souvent vu bêtement piégés par derrière, se jeta au sol, semblant glisser entre les mains de cet homme. Il roula en arrière, se plaçant entre les jambes écartées de l'homme, lui envoya le revers du pied dans les parties génitales. Hurlant, ce dernier se mit à sautiller sur place. Elyo, se releva, aussi excité qu'une puce, esquivant les quelques coups fébriles d'attaquants trop peu sûrs d'eux. L'homme qui avait apostrophé Gwendydd jaillit soudain à sa gauche, et fit quelque chose qui déstabilisa totalement Elyo : il le mordit au bras. La douleur monta comme un éclair dans Elyo qui essaya en un premier temps de la faire lâcher, pour cesser la douleur

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