Voilà.
Cela faisait sept
semaines, deux jours et des poussières. Mais... voilà. C'était
terminé.
Tulio et les membres de
sa famille les avaient salués une dernière fois, avant de
disparaître.
Voilà.
Les portes de la
frontière étaient passées, ils étaient à Reiche Stadt.
- Waaaaaaaouh! Murmura Willan.
Les autres ne trouvèrent
rien à redire. Tout autour d'eux, dans une ville en mouvement, les
merveilles visuelles s'étalaient : les architectures luxueuses ou
modestes, mais toutes empreintes d'une beauté unique, des statues
grimaçantes sur le toit des vielles bâtisses, ou les beautés
gracieuses figées dans la pierres, les étendues de lumières et les
tapis ténébreux, les bousculades sur les trottoirs et les silences
calmes dans les maisons, les cris de joies d'enfants et les chants
des oiseaux dans les gouttières d'argent... Argent...
Ce mot était présent
partout : les portes de fer sculptées minutieusement, les fontaines
de fer fondu, les hauts lampadaires noirs aux arabesques métalliques,
les façades des bâtiments importants, les toits miroitants au
soleil, les arbres aux feuillages d'acier, dont les lourdes feuilles
se balançaient paresseusement dans le vent...
Reiche Stadt, la ville
argentée.
Reiche Stadt était bâtie
sur un plan architectural singulier : comme un arbre dont les
branches se tendent vers le soleil, Reiche Stadt se levait,
majestueuse, vers le ciel.
Neufs niveaux. Sur neufs
niveaux, la ville s'étalait, en cercles, se dilatant au fur et a
mesure, dans une idée de spirale hexagonale. Les remparts qui
protégeaient les différents niveaux étaient larges, et hauts, et
une chute mortelle ne pouvait être accidentelle. Des six premiers
niveaux, la vie et la joie se faisaient sentir, mais, sur les
derniers étages blancs et argentés de la ville, le silence était
planant, mais apparemment naturel...
Effroyable vision que
celle qui s'offrait a quiconque levait la tête: parmi les nuages,
auréolant la ville et surplombant de sa puissance le montagne
royale, perché sur le plus haut des étages, et semblable a une
créature fabuleuse se dorant au soleil, Roc dominait.
Roc.
Le gigantesque château
blanc, demeure royale.
Inaccessible pour
quiconque n'appartenant pas a l'élite.
Elyo le fixait, sans
pouvoir en détacher son regard. Même du premier niveau, il était
inévitable. Et incroyablement beau.
Il fut secoué par la
main de Fline. Combien de temps avait il fixé Roc? Elyo ne le savait
pas et ce brusque revirement à terre le laissa pantois.
- Oui?
Bleue le fixa. Elle
ramena une mèche marine derrière son oreille et lui sourit
distraitement.
- Comment fais-t-on, maintenant?
Elyo ne comprit pas tout
de suite. Puis, il sourit.
- Notre but, ici, déclara t'il au petit groupe, est de trouver le maximum de renseignements sur l'Heimer. Et aussi... nous devons retrouver Karly. Il est une source d'information à ne pas renier.
Bleue le fixa. Elle
observa un moment son air déterminé.
- Trouvons d'abord un endroit ou dormir, ce soir, nous réfléchirons mieux avec un repas dans le ventre.
Le soleil se couchait en
effet, et dans quelque heure, la nuit tomberait. Autour d'eux,
toutefois, les gens continuaient leurs occupations, sans se soucier
d'eux, ou de l'heure.
Willan chercha des yeux
une auberge, et soudain, il tendit le doigt dans la même direction
qu'Elyo, et déclara en même temps : « Là! »
Synchronisation
parfaite...
En échange de cinq sous,
les quatre jeunes gens purent passer la nuit dans cette auberge, où
personne ne leur posa de question par rapport à leur âge. Ils
demandèrent à ce qu'on leur apporte leur repas dans la chambre
qu'ils partageraient à cinq. Vers dix huit heures, après une douche
soulageante, ils se réunirent dans la confortable chambre. Chacun
s'assit sur son lit, attendant la phrase qui viendrait rompre le
silence.
Ce fut Bleue qui se
décida.
- Par ou commencerons nous ?
Le feu dansait dans la
petite cheminée. Elyo ouvrit doucement la bouche.
- Commençons....
- ...par le commencement. Acheva Willan.
Ils ne se regardaient
pas. Comme de nombreuses fois, leur cerveaux étaient en parfaite
harmonie. Cette synchronisation déstabilisante devenait de plus en
plus forte. Plus les jours passaient, et plus l'union de leur esprit
se perfectionnait.
Le feu miroitait des
reflets mordorés sur leurs visages soucieux. Elyo répéta.
- Commençons par le commencement. Récapitulons.
Il ouvrit les bras, et
inspira.
- Nous avions dix ans. Le jour d'une fête de la ville. Des hommes en blancs sont arrivés à Faier-Hayrdhann. Et Karly est entré dans la chambre, ainsi que des hommes. Durant cette journée, nous avons découverts que nous possédions des dons enfouis. Des dons difficilement manipulables... Presque abstraits. Ensuite, -il marqua une pause-, Karly a disparu en nous ordonnant de travailler pendant trois ans, de chercher quelque chose... Puis, il a dit qu'on devait trouver l'essence même de l'Heimer. Ces trois passés, nous vous avons rencontré. Pendant sept mois, nous avons voyagé dans le but de nous rendre à Reiche Stadt. Et maintenant. Maintenant que nous somme ici, que nous avons quatorze ans, que faisons-nous ?
Ces derniers mots étaient
tombés dans l'esprit de tous, tranchants comme des épées. Personne
ne pouvait répondre.
Sauf Elyo.
- Cherchons-le.
Il avait redressé son
visage sombre, ou les flammes se reflétaient. Avec un sourire.
- Cherchons notre professeur.
Willan s'interdit de le
chercher du regard. Il fixa ses yeux émeraude sur les flammes
crépitant. Elles réchauffaient doucement son visage.
- Oui. Allons le trouver.
Bleue rompit doucement le
silence qui de nouveau s'était installé.
- Où est-il ? Qui est-il ? Ce sont deux questions importantes dont je n'ai pas la réponse.
Fline tourna ses yeux de
cristal vers les deux jumeaux, qui murés dans un silence
impénétrable, ne bronchaient plus.
- C'est … quelqu’un a partir du moment où il nous a donné son nom, à considéré qu’il n’était pas nécessaire d’en rajouter plus.
- Pourquoi donc ?
Willan soutint un instant
le suspens, mais pas par plaisir. Il frissonna au souvenir de leur
rencontre avec cet homme. L'impression qu'il leur avait faite avait
été tout sauf... normale.
Son regard revint
rapidement vers Elyo. Comme lui, les yeux verts étaient fixés sur
l'autre.
- Je pense qu'il devait savoir que nous n'en aurions pas besoin.
Bleue sursauta. Elle fixa
son regard brulant sur Elyo.
- Et pourquoi cela ? Il se croit aussi unique pour qu'avec un seul nom on puisse le retrouver ?
A sa grande surprise,
Elyo et Willan eurent le même sourire. Un sourire que l'on a
lorsqu'on sait une chose. Une chose que les autres ignorent.
- En fait, je crois qu'il ne s'attend pas a se qu'on vienne le retrouver...
Elyo tourna son visage
vers elle.
- Notre cher professeur... a pour nom Villi Tylmaridior.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire