vendredi 8 février 2013

22. Fin de la soirée.



Elyo se leva et s'étira. Le récit aurait pu être assez court, mais les autres avaient sans cesse demandé des détails auxquels il ne pouvait que répondre, ce qui avait considérablement allongé son flot de parole.
  • Comment se fait-il qu'il dorme depuis sept ans. Ça paraît incroyable.
  • Oui.
Willan se racla la gorge, captivant les attentions.
  • Oui ?
  • … Dites, on ne fait que parler de ce Iudhaël, alors qu'il n'existe pas encore vraiment, mais nous tous, là, on ne se connaît pas vraiment non plus. Mais on ne se parle pas.
  • Tu as raison, Will, murmura Elyo, on ne fait que parler de quelqu'un qui n'est pas là... Commençons ; Willan, qui es tu, comment t'appelle tu ?
  • Arrête, je ne trouve pas ça drôle.
  • Moi ça m'intéresse... Qui êtes-vous ? Demanda Bleue, le plus sérieusement du monde.
Les garçons se figèrent. Personne ne leur avait jamais demandé qui ils étaient, et le fond autant que la forme de cette question les mettaient particulièrement mal à l’aise. Qui pouvaient-ils être, qui eut besoin de mot pour s’expliquer ? Qui étaient-ils pour les autres ? Par rapport aux autres ?
  • Elyo Spirtyan... J'ai treize ans. J'en aurais quatorze au mois d’août... Je suis l’aîné...
Willan lui, fut plus enthousiasme à se présenter.
  • Willan Spirtyan, treize ans et huit mois. Euh, je m'intéresse beaucoup à la culture, la civilisation, la faune, la flore, tout ça... Euh, j'aime lire.
Bleue sourit.
  • Bleue, treize ans et un mois, j'adore dessiner, et marcher dans les forêts, écouter les oiseaux...
Et Fline, et bien il adore se transformer...Quand à son âge, je peux juste vous dire qu'il a dix ans... En fait, c'est une espèce de don qu'il a: il ne connaît pas son anniversaire, mais, il sait qu'il vieillît. Au fil des jours...
  • Comment ça ?
  • Du jour au lendemain, il saura s'il a vieilli ou pas.
  • Mais dans ce cas, il a juste à regarder quel jour il vieilli, et il sera fixé.
  • Ce n'est pas aussi simple... Il peut savoir qu'il a vieilli, mais ce ne sera pas instantané. Il le sait, mais pas immédiatement. Il sait juste qu'il vieillît. Par exemple, il peut avoir vieillît mercredi dernier, et ne le savoir qu'aujourd'hui.
  • C'est compliqué.
  • Oui.
  • Quelle est ta date d’anniversaire, Bleue?
  • Le 15 août.
  • OK, merci, je t'offrirais un cadeau...
  • Bleue, considère cela comme un plan pour te … draguer.
  • Elyo, la ferme.
  • Bien, mon cher.
  • Tu me cherche, Elyo ?
  • Oui, mais je ne te trouve pas... Ah si, tu es caché sous la feuille! Je ne t’avais pas vu! Désolé...
Elyo n'échappa pas aux éclairs foudroyants des yeux de Willan. Ni à ceux de Bleue. En même temps, il était heureux... C'était la première fois qu'il faisait preuve d'humour devant quelqu'un d'autre que son frère. Mais... Malgré son sourire, restait coincé dans sa gorge quelque chose d’amer. En dépit du rire qui se noyait dans ses yeux, il continuait à conserver cette impression d’être un individu superficiel, de façade, afin qu’on ne puisse pas le blesser. Le fait qu’il soit inaccessible le rendait dangereux, et hors de portée du danger.
Il baissa les yeux et pensa amèrement: « S'ils se mettent ensemble eux deux, ils vont me tuer... »
Il ne vit évidemment pas le regard fixe que lui porta Bleue.
  • Dites, franchement … On va chercher l'Heimer, maintenant ?
C'était brutal, voir limite stupide comme question, mais Willan devait savoir, et être fixé.
Il y eu un silence.
  • Je pense que si nous nous sommes rencontrés, ce n'est pas par hasard. Nous sommes liés, j'imagine.
_C'est vraiment étrange, murmura Elyo. Les dons, je savais que ça existait, mais que c'était rare. Que … c'était pour les autres.
Bleue acquiesça.
  • Elyo... c'est quoi ton... pouvoir ?
  • Eh bien... je ne sais pas vraiment … On m'a dit que ce serait le «coté caché des choses »... mais je ne sais pas ce que sais.
  • C'est énigmatique, dis donc!
  • Arrête, ce n'est pas drôle... Tu sais, ça fait trois ans maintenant... et il y a des fois où j'ai quand même l'impression que c'est un rêve, tout ça …
  • Moi aussi. Ne t'inquiète pas.
  • Et, dites, je le sais, du moins j’en suis persuadée, mais... vous croyez que l'Heimer a un rôle important? Que c'est un secret ?
  • Pas a Faier-Hayrdhann.
  • Oui, et je sais pourquoi, maintenant.
Willan tourna vers lui ses yeux émeraude.
  • Selon le chef de la ville, le Maire, et bien, nous serions nés ici... dans une famille qui venait de débarquée dans l’année. Et la femme était enceinte. Mais, elle n'a pas survécu à la naissance de ses deux enfants...
Il y eu un moment de silence, puis Willan murmura:
  • Elyo, ça va ? Tu es devenu blanc...
  • ... Elle se serait fait tuée par ses enfants. En donnant la vie, il faut en offrir une en compensation. Et cette naissance a fait le tour de la ville.
Il ferma les yeux. Willan devait savoir.
  • Et un jour, un voleur se serait introduit dans la maison, il aurait tenté de voler des notes à ce scientifique très célèbre et intelligent qu'était Karly Spirtyan, à l'époque.
Les notes sur des expériences interdites...
Elyo fuyait le regard de son miroir.
  • Il se trouve que l’on a retrouvé son corps dans le salon de Karly. C'était...un jour ou nous étions seuls à la maison, Karly s'étant absenté... Je crois qu'on avait deux ans, Willan.
Willan s'écria, enragé.
  • Tu raconte n'importe quoi!
  • C'était forcément une crise !
  • Je ne m'en souviens pas!
Bleue intervint:
  • Ce n'est pas pour cela que les habitants sont au courant pour l'Heimer! Ils vous considèrent peut être comme des tueurs, maïs ils ne savent rien sur l'Heimer! Est ce que l'un d'entre eux sait que vous avez des pouvoirs?
Il y eu un silence, puis Willan, encore tremblant de colère, préféra changer de sujet.
  • Bleue, tu contrôle l'aérodynamique ?
  • Euh, oui.
  • Willan, toi, se serait apparemment la lumière et la chaleur .Moi, je ne sais pas vraiment. Mais Fline, tu maîtrise quoi, à part les oiseaux ?dit Elyo, prenant le relais.
  • La nature. Répondît Bleue. Tu devrais le savoir, tu l'a vu faire pousser un arbre.
  • Ah c'est vrai. Je … je n'y avais pas pensé. Je n'ai pas eu le temps.
  • Quoi ? Qu'est ce que vous avez fait ces six derniers mois ?
  • On s'est entraînés physiquement surtout. On a... on a...
Elyo, désemparé, tourna les yeux vers son frère. La vérité était inévitable.
  • Et, on a croisé quelqu'un... en échangé d'un secret, il accepté de nous apprendre certaines choses... la médecine de base, la chasse, des trucs comme ça...
Bleue les fixa. Ils fuyaient son regard.
  • Un secret important?
  • Oui... très important.
Elle demanda une dernière fois.
  • Vous m'en parlerez un jour, n'est ce pas?
Willan lui sourit tendrement:
  • Bien sûr.
Elyo changea de sujet, pour en venir au plus important.
  • Et … on a appris à parler un autre langage. Un langage … différent ...
  • Lequel, le Dalish?
  • Non, le Kenntis.
  • Qu'est ce que c'est comme langue?
  • On à découvert que c'était une langue oubliée, disparue de nos mémoires, une langue morte … la langue oubliée qui coule dans les veines de cette terre. Une langue qui vient d'un autre monde. Une langue qui a fondée ce monde. Autrefois on l'appelait l'allemand.
  • Le Kenntis? La langue oubliée... je crois que... j'en ai entendu parler... mais je ne me souviens plus très bien... C'est étrange, ce mot résonne dans mon corps...
  • L'allemand. C'est une langue vraiment très étrange. Elle est très belle et très mystérieuse. Mais puissante.
  • Pourquoi ?
  • Ce serait un homme venant d'un autre monde, parlant cette langue, qui aurait crié et pleuré sa tristesse et sa colère des jours et des nuits, et toute la force de ses mots auraient déchirés le ciel et la terre, créant une brèche dans le néant. Brèche qu'il traversa. Quand il comprit qu'il n'était plus dans son monde, il a passé des heures a murmuré, face contre une terre noire, le ciel incolore, il aurait murmuré les mots d'amour et de tristesse, et son dernier souffle se serait insufflé a cette terre, créant ce monde. Mais on raconte aussi que les deux sentiments qui terrassaient l'homme entrèrent en conflit et déchirèrent cette terre en deux, créant les deux continents Straelitzie, et Talandie. Le continent de l'amour et celui de la tristesse.
  • C'est un conte.
Elyo resta silencieux. La scène se jouait devant ses yeux. Il voyait la silhouette tourmentée, les cris et les murmures, les sanglots...
  • Je ne crois pas... Je crois que ce monde existe...Je crois que Iudhaël nous attends là bas.
Bleue le regarda. Elyo la dévisagea, puis tourna le regard vers Willan. Il fut écrasé par le regard que celui-ci lui portait.
  • Willan ?
Le plus jeune des jumeaux détourna les yeux.
  • Désolé, je réfléchissais à un truc. Je pense qu'on devrait dormir.
Elyo ferma les yeux, avec le regard brûlant de haine et de passion de Willan gravé dans la rétine, presque effrayé.

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